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Campagne du Soldat Pierre LEROUSSEAU

15éme Régiment de Dragons







Pierre LEROUSSEAU est engagé volontaire pour 3 ans par devancement d'appel le 30 octobre 1913 à la Mairie de Limoges pour le 15ème Régiment de Dragons basé à Libourne quartier Lamarque.

Il arrive au corps le 21 octobre 1913.





La Division avait, pour les premiers jours, une mission de couverture en Lorraine. Le 3 Août, à 22 heures, le 1er Escadron avec l'E. M., embarquait. Tout le Régiment était en route dans la nuit.

En Lorraine - Les premières opérations.



Le débarquement se fit à Barizey-la-Côte, près de Toul, dans la journée du 5. Le premier cantonnement de la campagne fut Thuilley-aux-Groseilles ; le second Coyviller, d'où le Régiment partit le 7, pour Lunéville. Il logea dans un des quartiers de la 2ème Division de Cavalerie qui était déjà en couverture au Nord de la forêt de Parroy.

Le Régiment demeura sur place du 7 au 13 inclus, passant les journées en surveillance au Nord de la ville, sous un soleil torride, dont les hommes s'abritaient tant bien que mal, en construisant à l'aide de leurs lances et de gerbes de blé, d'ingénieux abris.

Le 15ème Dragons avait reçu, à son arrivée à Lunéville, la mission spéciale de surveiller et garder le couloir situé à l'Est, entre la forêt de Parroy et la voie ferrée Nancy-Avricourt. Le Colonel envoya donc deux détachements : le 7 Août, le 3ème Escadron vers Emberménil ; le 8, la Section de Mitrailleuse, ayant le Peloton du 4ème Escadron), comme soutien, à Laneuveville-aux-Bois.

Deux reconnaissances ne tardent pas à prendre le contact. Le 7 Août, vers 22 heures, le Lieutenant DOP, traversant la forêt de Parroy, se heurte à des Cyclistes, qui t'attendent derrière une barricade, et qui lui tuent deux chevaux. Le lendemain, à la pointe du jour, le Lieutenant De BATZ, envoyé en reconnaissance sur Avricourt, est accueilli, lui aussi, par une vive fusillade. Une troisième reconnaissance est reçue, comme les autres, par des coups de fusil.

Pendant que l'Escadron GOMMES opérait ainsi, vers Emberménil, la Section de Mitrailleuses était en surveillance à Laneuveville-aux-Bois. Le 12 Août, elle a l'occasion de prendre sous son feu une reconnaissance du 7ème Dragons Wurtembergeois. Elle la fauche presque complètement.

Enfin, le dernier jour du stationnement à Lunéville, le 13 Août, le Lieutenant Des ÉTANGS est envoyé, avec son peloton, en reconnaissance, au sud de la voie ferrée Lunéville-Avricourt, dans la région Véholeintrey-Gondrexon-Domèvre. Parti à la pointe du jour, le Lieutenant avait envoyé d'utiles renseignements. Il avait déjà eu, au cours de la matinée, des rencontres avec des patrouilles ennemies et avait réussi à faire un prisonnier. Vers 14 heures, il poursuivait sa reconnaissance aux environs de Chazelles. Soudain il tombe sous une violente fusillade partant d'un bois. Il veut rebrousser chemin. Mais au même moment, un escadron d’Uhlans tombe sur lui et lui barre la route.

Le Lieutenant n'a qu'un peloton épuisé et, devant lui, un ennemi frais, trois fois supérieur en nombre ; mais l'idée de se rendre, ne lui vient pas un instant à l'esprit. Il fonce, suivi de tous ses hommes, sur les uhlans, qui les reçoivent à coups de revolver, puis avec leurs lances. Le Lieutenant est tué, le Maréchal des Logis également. Un grand nombre de dragons tombent après avoir mis à mal beaucoup d'ennemis. Ceux-ci, surpris par tant d'audace ramassent les blessés et les font soigner, puis ils enterrent les morts dans le cimetière de Chazelles, après leur avoir rendu les honneurs militaires.

Cette héroïque action d'éclat nous coûtait 11 tués et 9 blessés ou disparus, au total : 28 hommes hors de combat, tant Officier que gradés ou Cavaliers et 27 chevaux tués ou blessés. Tout le Peloton disparaissait ainsi.

La période de couverture se termine pour nous sur ce fait d'armes. Le haut commandement a décidé de prendre l'offensive. Le 15 Août, les trois Divisions Cavalerie sont constituées en Corps de Cavalerie qui doit prendre part aux opérations offensives des deux Armées qui s'avancent, la première sur Sarrebourg, la deuxième sur Morhange.

Le Corps de Cavalerie, entre les deux, doit assurer leur liaison. Il se porte dans la région des Grands Étangs, entre Dieuze et Sarrebourg. Le 17 Août, le 15ème Dragons passe la frontière et entre en Lorraine annexée à Avricourt. Le 4ème Escadron est en avantgarde. Le 18, la marche en avant se poursuit sur Haut-Clocher.

Ce fut là que le Régiment reçut véritablement le baptême du feu. Le Demi-régiment (3ème et 4ème Escadrons) reçurent quelques obus aux abords de ce village, mais sans pertes. Peu de temps après, le Régiment et toute la Division Cavalerie qui devaient continuer leur mouvement dans la direction de Saverne, sont arrêtés par l'Artillerie et l'Infanterie ennemies. A ce moment, les deux Armées subissent les échecs de Sarrebourg et de Morhange. Il leur faut battre en retraite.

Le Corps de Cavalerie est chargé de protéger le repli. Il doit faire tête pour ralentir la marche de l'ennemi et permettre au commandement de regrouper ses forces en vue d'une nouvelle bataille. La direction générale est Sud-ouest. Le Général a décidé de se replier, au Sud de la Mortagne, et de livrer bataille à la Trouée de Charmes, dont un des points les plus importants est le village de Rozelieures.

Dès le 20 Août, la retraite commence. Le Régiment, qui était à Héming, à l'Est de la région des Étangs, se porte au Sud de La Meurthe, par Gogney et Chazelles, où les honneurs sont rendus à nos morts du 13 Août. Le 22, la Mortagne est franchie, et le 23, les dispositions sont prises pour arrêter, ou tout au moins retarder les colonnes ennemies qui débouchent de Lunéville. Le 24 Août, le gros du Régiment se tient en surveillance sur les hauteurs de Morivilliers, au Sud de la Mortagne.

A la pointe du jour, le 2ème Escadron est envoyé en découverte sur Moyen et Lunéville. Il tombe sur une forte colonne ennemie qui l'empêche de passer; mais dans le bois de Fraimbois, il réussit à surprendre une patrouille d’Uhlans et à faire un prisonnier qui lui fournit des renseignements précieux.

Ce même jour, le 4ème Escadron est mis, avec la Section de Mitrailleuses, à la disposition du Commandant du 20ème Dragons. Celui-ci, avec son Demi-régiment et un Peloton Cycliste, a pour mission de retarder l'avance de l'ennemi qui débouche de Lamath dont le pont est intact, par suite d'un raté dans la mise de feu.

Après avoir fait, sur les bords de la Mortagne, un premier combat à pied contre une forte colonne ennemie marchant de Lunéville sur Gerbéviller, l'Escadron s'installe, à 9 heures, pied à terre, avec la Section de Mitrailleuses, dans le village de Franconville, où il a mission de tenir le plus longtemps possible.

Quelques patrouilles de Cavaliers ennemis se montrent. Elles sont accueillies par des rafales de mitrailleuses et des coups de carabine. A 11 heures 30, l'ennemi bombarde violemment le village. La toiture du clocher et de l'église vole en éclats tombant sur les chevaux haut-le-pied cachés non loin de là et tuant un garde-chevaux. Pendant que l'Artillerie continue un feu nourri, les Fantassins ennemis commencent à s'infiltrer dans un champ de betteraves, le long du mur du cimetière. Le 3ème Peloton accueille les Allemands à coups de carabine. Le Capitaine donne alors l'ordre de remonter à cheval pour battre en retraite, l'opération ne se fait pas sans difficultés.

Enfin la Section de Mitrailleuses s'ébranle dans la direction de Morivilliers, d'où elle était venue. Au moment où elle sort du village de Franconville, elle reçoit une rafale d'obus.

Pendant que la Section de Mitrailleuses battait en retraite vers le Sud, l'Escadron De LEOBARDY tentait de s'échapper dans la direction Sud-ouest. Mais les Fantassins ennemis, ayant dépassé le cimetière, tiraient à bout portant sur les Cavaliers qui remontaient à cheval. Il fallut prendre à travers les prairies et partir au galop pour ne pas être complètement enveloppé. Enfin, l'Escadron réussit à s'échapper en fourrageurs, malgré les obus qui le suivent et le feu intense des Fantassins ennemis, qui n'avaient heureusement que peu de mitrailleuses à ce moment. Après s'être reformé et reposé près d'Einvaux, il rejoint le détachement THUREAU à Villacourt.

Les combats livrés par les éléments du Corps de Cavalerie et les pertes qu'ils ont subies, n'ont pas été inutiles, car le 26 Août se livrait la bataille que les Soldats appelèrent la « bataille de Rozelieures » et qu'on a nommée en haut lieu la « bataille de la Trouée de Charmes ». Le Général De CASTELNAU y remportait une incontestable victoire sur l'ennemi qui devait à son tour battre en retraite.

Le Corps de Cavalerie avait rempli sa mission puisqu'il avait permis au commandement de regrouper ses forces et de prendre toutes ses dispositions pour la bataille.

Après leur défaite, les Allemands se replièrent vers le Nord. On essaya de lancer la Cavalerie à leur poursuite, mais les Escadrons envoyés en découverte furent arrêtés net par l'Infanterie ennemie. Le Demi-régiment (1er et 2ème Escadrons) envoyé sur Damas-aux-Bois, Daimviller, Saintpierremont, ne put passer la Mortagne et dut revenir à Virecourt, où le Régiment prit un peu de repos.

Les derniers jours d'Août se déroulèrent sans fait saillant. Le commandement, voyant que l'ennemi tenait trop fort pour pouvoir faire passer sa Cavalerie prit le parti de garder celle-ci en réserve jusqu'à nouvel ordre. Le 15ème Dragons alla cantonner à Tomblaine, à la porte de Nancy. Le 1er Escadron envoya alors sur la Seille quelques reconnaissances. Elles rencontrèrent, tout le long de la frontière, des avant-postes ennemis.

Ainsi se termina, pour le Régiment la campagne de Lorraine. Après un court repos bien nécessaire, d'autres combats l'attendaient.



La Marne et la Course à la Mer.



Le 1er Septembre 1914, à 17 heures, le premier élément du Régiment quittait Tomblaine pour aller embarquer en chemin de fer à Pont-Saint-Vincent. Le 4ème Escadron débarquait le dernier, dans la nuit du 2 au 3 Septembre, à Épernay.

Le Régiment, cantonné d'abord à Dizy-Magenta, fut alerté le 2 Septembre, à 17 heures, sans le 4ème Escadron, et après une nuit de bivouac à Condé-en-Brie, repartait vers le Sud-ouest. Le 3ème Escadron, détaché en reconnaissance, trouvait le contact à Nogent-l'Artaud, pendant que le Régiment, réduit à deux Escadrons, cantonnait, le 3 au soir, à Champlion. La bataille allait commencer le 4.

A 7 heures, le 4ème Escadron ayant rejoint, le Régiment se trouvait en halte au Sud de Vieils-Maisons, ayant franchi la Route Nationale N° 33 de Paris à ChâlonsS, au 80ème kilomètre de Paris. La mission générale du Corps de Cavalerie était de couvrir la retraite du 18ème Corps d’Armée et, pour cela, arrêter la marche Nord-Sud de l'ennemi et interdire notamment les passages du Petit-Morin.

Le secteur de la Brigade était aux alentours de Vieils-Maisons. A 8 heures, la Brigade se porte sur ReplongeE, et le 1er Escadron du régiment, à l'avant-garde, trouve les Fantassins ennemis à la lisière Sud-ouest de la « Grande Forêt ». Arrêté par le combat à pied du 1er Escadron, ceux-ci se déploient vers le Sud et commencent à s'infiltrer en direction Sud-Sud-est, par Bellot, vers Villiers-les-Maillets. La retraite des Brigades est ordonnée sur Villiers, et vers 14 heures, la Division se rassemble en ce point. La 2ème B. L. prend pour objectif : Verdelot ; la 10ème Brigade de Dragons : Bellot. Le 3ème Escadron qui vient de rejoindre, envoie des Pelotons en reconnaissance sur le Petit Morin, tandis que les éléments disponibles du Régiment s'installent au combat à pied à la lisière Est de Grand-Doucy. Un duel d'Artillerie s'engage entre une section de 77, en position au Nord de Grand-Doucy et l'Artillerie de la Division.

Mais l'ennemi, tenu par nos feux, ne peut déboucher, et continue son mouvement vers le Sud. Le combat dure toute l'après-midi, jusqu'à ce que la progression ennemie, s'accentuant vers Saint-Barthélémy et se rabattant sur Villiers-les-Maillets, la retraite doive être ordonnée vers Saint-Martin-des-Champs. Saint-Barthélémy est tâté au passage : l'ennemi y est déjà.

Le régiment continue la retraite par petites fractions, franchit le Grand-Morin à la Ferté-Gaucher, barricade le pont que d'autres troupes viennent ensuite occuper et cantonne à Saint-Mard à 22 heures. Cette journée nous coûtait un tué, sept blessés et plusieurs chevaux.

Le lendemain le Régiment, encadré dans la Division, se porte au Sud de Champcenetz. Le Demi-régiment GIRIER a pour mission de défendre la lisière Nord du bois des Marets ; l'Escadron De LEOBARDY, les passages de l'Aubetin à Beton-Bazoches. Ces détachements combattirent toute la journée sous le bombardement et ne se retirèrent que pied à pied. Le Régiment bivouaqua le soir à Bouillot-BouillyY, à quelques kilomètres au Nord de Provins. Il stationna le lendemain aux environs. La retraite était terminée.

Le 7 Septembre, le Régiment prenait sa part de l'offensive victorieuse. Une reconnaissance du 4ème atteignait Lescherolles dès midi. Le gros avançait vers le Nord par bonds successifs et cantonnait le 7 à la Chapelle-Véronge, le 8 à la Couarde. Le 9, à 15 heures, il était en vue de Château-Thierry, où les Cyclistes d'avant-garde se heurtaient sur le pont à l'ennemi en retraite. L'attaque est décidée.

Le Régiment reçoit pour objectif la terrasse du Château. Le 4ème Escadron est de direction (pont du chemin de fer sur La Marne, traversée de la ville, route de Montmirail). Il est suivi par le 2ème. Le 3ème doit franchir La Marne au faubourg de l'Est. Ces mouvements, vivement menés, contribuent à faire tomber la défense des entrées de Château-Thierry, et les Escadrons, faisant au passage quelques prisonniers, ne s'arrêtent qu'à la sortie Nord, sur la route d'Oulchy-le-Château, où ils se rassemblent pour couvrir le débouché de la Division Cavalerie.

Ce débouché est réalisé à 19 heures. La Division Cavalerie se rassemble à la ferme Farsoy. Les jours suivants, le Régiment encadré continua la poursuite vers le Nord. Les gîtes d'étape furent La Poterie, Chéry-Chartreuve (bivouac), Romain. La Vesle était franchie à Fismes, le 12, vers 18 heures. Le 13, au matin, le 3ème Escadron, avant-garde de la division, qui précède elle-même le 18ème Corps d’Armée, signale que le pont de l'Aisne est tenu à Pontavert. Ce pont est aussitôt battu par une batterie volante du 18ème Corps d’Armée, et la barricade est enlevée par l'Escadron tête d'avant-garde, qui traverse Pontavert au galop en faisant des prisonniers.

A 10 heures, la Division a franchi l'AisneE. Le 1er Escadron est porté vers Corbény avec la Batterie volante du 18ème Corps d’Armée: il y est arrêté par un feu violent, et rejoint à Amifontaine où le Régiment est arrivé vers 11 heures, non sans que l'avant-garde ait dû mettre pied à terre pour chasser les éléments ennemis attardés dans les bois de la Ville-aux-Bois.

La Brigade Légère fait alors l'avant-garde, et le Régiment cantonne le soir à Sissone. Ce sera le terme de cette randonnée victorieuse de sept jours pendant lesquels le Régiment avait poussé l'ennemi durant près de 300 kilomètres.

Dès le lendemain, la Division trop aventurée dut se replier, son flanc Est couvert par la Brigade. Les éléments attardés du Régiment eurent beaucoup de peine à repasser l'Aisne. Après deux jours de stationnement à Merval et environs, le Régiment alla cantonner, par Fismes, à Coulommes et où il reçut l'ordre de se porter dans la région Ouest de Compiègne. La Course à la Mer allait commence.

Plusieurs jours d'étapes, marqués par les cantonnements de Vézilly, Saint-Pierre-Aigle, Armancourt, Wacqueville (où le Régiment reçut ses premiers renforts) et Fescamps, amenèrent le Régiment, le 23 Septembre au matin, au Sud de Chaulnes. La Division Cavalerie avait reçu l'ordre de couvrir la gauche du IVème Corps d’Armée qui attaquait vers Nesle et de masquer le XIVème Corps d’Armée.

Le contact était pris depuis la veille avec les éléments ennemis (principalement de Cavalerie) qui montaient vers le Nord. Le Régiment, avant-garde de la Division Cavalerie, et soutenu par des Cyclistes, engagea, vers 10 heures, quelques rencontres de patrouilles autour d'Hallu. A midi, Chaulnes était à nous. Le premier Demi-régiment s'y établissait en halte gardée, tandis que le reste du Régiment recevait l'ordre de couvrir Marchélepôt. Le Colonel fait alors attaquer le village de Licourt. Le Brigadier LOUIT est tué ; plusieurs hommes blessés... L'attaque est arrêtée.

Cependant la Division Cavalerie a reçu la mission d'appuyer l'attaque de la 28ème Division au Sud-est de Chuignolles. Après une nuit en surveillance, le lendemain, à l'aube, la Brigade est donc portée vers le Nord-est, sur La Somme, avec la mission d'emporter le pont de Saint-Christ, qu'une reconnaissance a signalé comme occupé.

Mais l'ennemi est en nombre supérieur et la Brigade, gardée vers Misery par le 3ème Escadron, se replie sur Marchélepôt, puis, sous le feu ennemi, vers le Nord de Lihons, où elle rejoint la Division. Le Régiment passe la nuit à Cerisy-Gailly et, les jours suivants, encadré dans la Division, marche parallèlement à l'ennemi, vers le Nord.

Le 1er Octobre, après un cantonnement d'alerte à Hendecourt-les-Ransart, le Demi-régiment GIRIER est envoyé à Boirybecquerelle. Le Demi-régiment est alors relevé. Le lendemain, la Division se porte en expectative à la sortie d'Arras, au faubourg Saint-Sauveur. Le 3 Octobre, une reconnaissance du Lieutenant DOP autour d'Achiet ramène un prisonnier et des Fanions ennemis. Le 4, à 7 heures 30, la Brigade rassemblée au Nord de Neuville-Saint-Vaast, reçoit l'ordre d'appuyer avec une Batterie, l'aile droite de la 70ème Division de réserve, à Roclincourt. Deux Escadrons sont mis en réserve au faubourg Saint-Laurent, les deux autres comme soutiens d'Artillerie au Sud de la route de Douai, au «Point du Jour».

Le 5, vers midi, l'ordre de repli est donné. Le Régiment traverse Arras, par la célèbre place, où les premiers obus commencent leur œuvre de destruction, et rejoint la Brigade à Beaumetz pour renforcer le 13ème Hussards contre des infiltrations ennemies venant du Sud-est.

Plusieurs reconnaissances d'Officiers sont envoyées sur Rivière, Basseux, Bailleulval, Adinfer. Les jours suivants, le Régiment, au contact immédiat, tient le secteur Fosseux- Gouymonchiet, puis se porte vers Ransart. Le 8 Octobre, le Régiment, diminué du 3ème Escadron, mis jusqu'au 10 Octobre, à la disposition du Groupe d’Armée provisoire, pousse, sans coup férir jusqu'à Ransart ; mais le lendemain, l'ennemi est fortement établi sur la ligne Blaireville, Ransart (qui est reperdu), Monchy-aux-Bois.

Notre Infanterie commence heureusement à arriver : la mission du Régiment, pendant les jours suivants, va être une mission de protection, de surveillance et de liaison. La Brigade est, du reste, dissoute le 12 Octobre et le Régiment affecté comme Régiment de Corps au Xème Corps d’Armée.

Le 13 Octobre, il est en surveillance sur Basseux- Ransart, vers lesquels il envoie de nombreuses reconnaissances et assure les liaisons du Xème Corps d’Armée avec la 88ème Division Territoriale et la 19ème Division puis le 15 octobre, avec la 8ème Division Cavalerie et le XXème Corps d’Armée. Ce soir-là, le Régiment, cantonné jusqu'alors à Fosseux, se porte à Wanquetin, où il restera un mois et qui sera le point de départ des reconnaissances et des liaisons.

Pendant l'attaque des 17, 18 et 19 Octobre, le Régiment assure la liaison entre la droite du Xème Corps d’Armée à Beaumetz-Bailleulval et la gauche du XXème Corps d’Armée, à Berles-aux-Bois. Les jours suivants, cette liaison ne nécessite plus que deux pelotons : un à Bellacourt, un autre à Pommier. Ces dispositions sont maintenues, avec quelques modifications de détail, jusqu'au 12 Novembre.

Le Régiment, dans l'attente de l'offensive victorieuse qui lui rendra son véritable emploi, travaille à la remise en état des chevaux épuisés et goûte un demi-repos bienfaisant. Mais la période de stabilisation va commencer dans le secteur comme sur le reste du front.

Le Régiment reçoit l'ordre de rejoindre la Division d'origine où la Brigade est reformée. Le 16 Novembre, ayant accompli sa mission et contribué à fermer à l'ennemi la route de Calais, il s'embarque à Saint-Pol. Le 18 Novembre, débarqué à Charmes ( il s'établit à Bainville -aux-Miroirs et Lebeuville : il y restera, au repos, jusqu'au 11 Décembre.

Cette période est utilisée pour donner à nos Cavaliers la première instruction de la Tranchée. Les carabines sont remplacées par des mousquetons avec baïonnettes : un Groupe à pied éventuel est constitué par deux Escadrons mixtes de la Brigade et va exécuter des exercices aux Tranchées de première ligne, à Einville. Le Régiment reçoit aussi 60 chevaux et quelques hommes de renfort. Le 11 Décembre, comme les premiers froids commencent à se faire sentir, le régiment est embarqué à Châtel, et débarque près de Belfort, à Champagney.



En Alsace - Début de la Guerre des Tranchées.



Le Régiment arrive en Haute-Alsace au moment où les lignes adverses, qui ne bougeront plus pendant toute la guerre, s'établissent par tâtonnements ; après quelques jours à Reppe, sur la frontière (du 13 au 21 Décembre), le Régiment s'installe à Rougemont-le-Château, d'où il envoie à la 115ème Division d’Infanterie les premiers travailleurs pour la construction des Tranchées.

Le 25 décembre, pendant la messe de minuit, arrive un ordre d'alerte. Le Général BERNARD commence un mouvement offensif avec la 67ème Division d’Infanterie sur le front Wattwiller-Pont-d'Aspach et le Régiment est mis à sa disposition à Traubach-le-Bas, pour les liaisons : 1er Escadron avec la 113ème Brigade d’Infanterie; 4ème Escadron avec la 114ème Brigade d’Infanterie.

Ces différentes liaisons s'accomplissent sans incidents le jour de l'attaque, et les jours suivants, et toujours à cheval. La physionomie de la bataille à ce moment-là était bien différente de ce qu'elle devait être plus tard : pas ou peu d'Artillerie, pas de mitrailleuses, quelques rares Tranchées discontinues ; entre Dannemarie et Altkirch une zone encore neutre, peu garnie, où les Patrouilles, au sortir des bois, circulaient en pleine vue, sans être obligées de mettre pied à terre. Les Escadrons rentraient à la nuit dans leurs cantonnements (successivement Traubach, Dannemarie, Bréchaumont, Wolferdorff) et se relayaient le jour.

Tout le début de 1916 se passa ainsi, en missions obscures. Le 8 Janvier, le Général SAUZEDE prend et reperd Burnhaupt-le-Haut ; le 27, la 57ème Division d’Infanterie attaque Ammertzwiller ; pendant toutes ces opérations, les Escadrons sont occupés aux liaisons ou alertés. Le 28, ils reçoivent même le baptême des Tranchées ; 200 hommes occupent la ligne, en avant de Ballchwiller par un froid très rigoureux. Cette occupation de Tranchées ne dura que…. 4 heures.

Le 29, l'attaque étant arrêtée, le régiment prit ses quartiers dans la charmante ville de Massevaux, qui allait lui laisser, et où il allait laisser lui même, tant de souvenirs. Du 29 Janvier au 3 Septembre il cantonna dans la ville ou dans les villages de la vallée et de la montagne : Sickert, Niedrrbrüch, Huppach, Bourbach-le-Bas.

Dès le 30 Janvier, un premier détachement avec 300 hommes et 8 Officiers allait prendre le service à Aspach-le-Haut. Les lignes qui passaient vers la gare étaient encore mal définies, et les Cavaliers bien neufs en ce genre de combat. Mais ils s'adaptèrent vite et surent, dès le début, faire les travaux de secteur nécessaires. Le plus pénible fut pour eux les longues marches d'approche à pied, par le froid glacial. Cette première relève ne dura que 48 heures. A partir du 10 Février le service se prit par Brigade. Du 10 au 16 Février puis du 28 Février au 6 Mars, du 18 Mars au 24, enfin du 5 au 10 avril, la Brigade fut en secteur à Aspach, les hommes travaillant jour et nuit aux boyaux, aux fils de fer et aux abris.

Du 14 au 18 Avril, la Brigade fut en ligne dans les bois de Michelbach où elle eut à subir de forts bombardements; elle reprenait la garde du secteur d'Aspach du 26 Avril au 1er Mai. Vers cette époque, l'organisation de la défense est assez avancée pour que l'on puisse diviser le terrain en secteurs et sous-secteurs.

A partir du 30 Juin, un nouveau régime de Tranchées est inauguré par le Régiment. Celui-ci doit fournir, dans le sous-secteur de la gare de Burnhaupt, 200 combattants à pied qui resteront en ligne. 8 jours (2 jours en réserve, 4 jours aux avant-postes, 2 jours en réserve). Il y eut ainsi, pour le Régiment, six périodes de Tranchées à Burnhaupt (30 Juin, 12 et 24 Juillet, 5, 17 et 29 Août). Ces différentes relèves furent assez clémentes ; le secteur demeura très calme et le Régiment n'eut à déplorer que peu de pertes.

Cependant, dans les intervalles de Tranchées, il ne restait pas inactif; il continuait l'instruction et participait à des prises d'armes.

Beaucoup de modifications eurent lieu pendant cette période dans les cadres du Régiment. II. faut signaler d'abord la création d'un Escadron à pied, qui devait constituer plus tard, avec d'autres éléments démontés de la Division, un Régiment à pied, finalement fondu dans les D. C. P. (Divisions de Cuirassiers à Pied). Cet Escadron s'affirma, dès le début, comme une unité d'élite. Dans le même temps, beaucoup de Sous-officiers, répondant à l'appel du commandement, passèrent comme Sous-lieutenants, dans l'Infanterie.

Ainsi modifié, le régiment quitte Masevaux le 3 Septembre ; après un stationnement dans la région de Petit-Croix (Haut-Rhin), il s'installe, le 12 Septembre, à Grandvillars, sur la ligne Paris-Delle. Il y restera jusqu'au 20 Février 1916, puis, du 21 Février au 14 Mars dans la région de Petit-Croix, enfin, du 14 Mars au 27 Mai, dans celle d'Allenjoie (Doubs). Pendant ces huit mois le Régiment continua à envoyer aux Tranchées, avec le reste de la Division, le « Bataillon Cavalier » ou des équipes de travailleurs. Les garnisons chevauchèrent, et les mitrailleurs prirent un service indépendant, de telle sorte qu'il n'est pas possible de donner le détail de toutes les relèves. Il suffira de dire que le Régiment fut en secteur presque sans interruption pendant toute cette période. Il fit d'abord des travaux de deuxième ligne dans la région Mertzenstrueth ; puis, au 2 Novembre, prit les Tranchées à Balschviller.

Du 11 Décembre au 29 Avril 1916, le Régiment occupa le C. R. de Fülleren (Forêts communales) puis, à cette dernière date, celui de Pfetterhouse. Ces différents secteurs demeurèrent calmes pendant tout le temps de l'occupation de la Division.

Par ailleurs, le Régiment subit quelques pertes relativement légères. Les hommes, entraînés à la marche, avant appris à se protéger, et dotés au 5 Novembre du casque bleu, puis des nouveaux engins de Tranchées, se pliaient, non sans regrets, mais de bon cœur, à ce qu'on demandait d'eux.

Le 27 Mai 1916, la 10ème Division de Cavalerie était dissoute. Le Régiment embarquait le jour même, à partir de 15 heures, à Belfort. La Brigade était affectée à la 3ème Division Cavalerie avec la 10ème Brigade de Dragons, où elle allait remplacer la Brigade de Cuirassiers.

Après 18 mois de séjour en Alsace, elle allait connaître dans l'Ile de France, sur la Somme et sur l'Oise, d'autres destinées.



Fin de la guerre des tranchées.



Le Régiment, privé du 5ème Escadron, qui passe à la 2ème Division Cavalerie, débarque le 20 Mai à Marseille-en-Beauvaisis, où cantonne l'État-major. Le 2 Juin, un détachement de 200 hommes inaugure les Tranchées et reste en secteur à Marquivillers (Nord-est de Montdidier) jusqu'au 18.

A son retour, la Division, qui fait partie du 1er Corps de Cavalerie se groupe avec lui, autour du camp de Crève-Coeur pour faire de l'instruction et de l'entraînement. Le 29 Juin, le Régiment s'établit au repos à Souplicourt (Somme). L'instruction y est continuée, surtout celle de la signalisation et les Officiers et Sous-officiers se remettent à cheval sur des parcours d'obstacles très réussis.

Du 11 Août au 10 Septembre, le Régiment est à Foucarmont (Seine-Inférieure) et jouit de la proximité de la forêt d'Eu. Mais, le 10 Septembre, arrive l'ordre de départ et le Régiment va, par Aumale, Poix, Conty et Boves, s'installer le 13, au bivouac dans les bois de Vaire, près de Hamel (Camp N° 61). Il y resta jusqu'au 7 Octobre, par un temps horrible, attendant vainement l'heure d'intervenir. Les hommes et chevaux qui avaient beaucoup souffert trouvèrent à Bonneuil-les-Eaux (Oise) le repos nécessaire.

Le 16 Novembre, le Régiment s'étant porté la veille à Cinqueux, un détachement de 200 hommes avec les deux nouvelles Sections de Mitrailleuses, part pour les Tranchées au Nord de Compiègne. Ce détachement sera relevé par un de même effectif, 25 jours après, et ainsi de suite jusqu'au 7 Mars 1917. Entre temps, le Régiment, après quelques jours à Moussy-le-Neuf et Moussy-le-Vieux, allait cantonner, le 4 Décembre, dans la région de Villiers-sur-Morin (Seine-et-Marne) puis, le 26 Janvier 1917, dans celle de Mériel, Villersadam (Seine-et-Oise).

Le 10 Mars, le Régiment reçut un ordre de départ. Le Régiment se dirige vers le Nord-ouest (MonnevilleE) puis, vers le Nord (Villers-Saint-Barthélémy, Crillon, Fontainelavaganne). Le 18 Mars, il se rabat vers l'Est (Villers-sur-Coudun). Les Allemands ont commencé leur fameux repli, sans qu'on puisse savoir encore s'il s'agit d'une large retraite ou d'une simple rectification de front. Le Régiment, espérant que l'heure de la poursuite va sonner enfin, attend fébrilement les ordres.

La Division est affectée à la 1ère Armée qui a atteint le 18 au soir, la ligne Chevilly-Crisolles (5 kilomètres Nord de Noyon)-Béhéricourt et qui pousse dans la direction de La Fère. La Division reçoit l'ordre de se porter sur Noyon, de dépasser les avant-gardes d'Infanterie et de précéder l'Armée avec la triple mission de disperser les arrière-gardes ennemies, de tenir les ponts de l'Oise pour interdire le passage aux éléments retraitants du Sud au Nord, et de reconnaître la ligne d'arrêt de l'ennemi.

A Noyon, la Division se partage en deux colonnes : l'une à droite, marchant sur Chauny ; l'autre à gauche, sur Villequier-Aumont, par Béthancourt. Le Régiment appartient à cette dernière et fait l'avant-garde sur les routes que l'ennemi a rendues impraticables. Il occupe Villequier (qui brûle encore) à 19 heures 30 et y établit les avant-postes. Le lendemain, dès l'aube, il a l'ordre de reconnaître le canal de Saint-Quentin entre Quessy et Mennesis, pour continuer si possible sur Vendeuil. Plusieurs patrouilles sont envoyées sur la voie ferrée Tergnier-Saint-Quentin, à hauteur de Liez et celle vers Mennesis sont reçues par des coups de feu à hauteur du canal qui est fortement tenu et dont tous les ponts sont coupés.

Le Régiment, qui est massé dans les bois de Frières, ne peut déboucher et, relevé à 18 heures par l'Infanterie, reçoit l'ordre de rejoindre Villequier-Aumont. Il lui faut renoncer, une nouvelle fois, à l'espoir de la poursuite. Mais ces deux journées ont montré qu'il n'a rien perdu de son esprit Cavalier.

Longeant la lisière Ouest de la forêt de Compiègne, le Régiment gagne Boursonne, au débouché Sud-ouest de la forêt de Villers-Cotterêts. Mais il n'y reste guère ; il repart le 12 Avril, en vue de l'attaque française qui se prépare. Par Troësnes et Villers-sur-Fère, il se porte en expectative au N. de Fismes. Mais, cette fois encore, il lui faut revenir sans avoir eu l'occasion d'être employé. Il redescend vers le Sud-ouest. (Montreuil-aux-Lions) stationne quelque temps aux environs de Meaux, puis remonte le 28 sur Largny, auprès de Villers-Cotterêts.

Du 2 au 26 Mai, le Régiment tiendra les Tranchées (quartier de la Croix-Saint-Jean) puis, à la fin du mois, sera affecté au service d'ordre du Gouvernement Militaire de Paris, dans la région de Dammartin en Goële et Saint-Mard. Remis le 20 Juin à la disposition des Armées, il se dirige, par Morienval et Aattichy sur Brétigny (AisneE) et les villages voisins, où il cantonne du 22 Juin au 20 Août. La Brigade monte aux Tranchées au Sud de l'Oise, d'abord devant Amigny-Rouy (Faye de ServaisS), puis, devant Barisis (Ferme du Crotoir), sous des bombardements continuels, qui, avec les patrouilles et les travaux, rendent ce secteur très pénible (25 Juin, 15 Août).

Le 20 Août, le Régiment part pour Chantilly, d'où il se rendra, le 30, à Mitry-Mory (Seine-et-Marne) afin d'assurer la garde de la poudrière. Il y reste quinze jours, passe ensuite une semaine à Saint-Firmin et s'installe, du 23 Septembre au 1er Novembre, dans le village ruiné de Vézaponin (Aisne), d'où il va prendre les Tranchées devant Coucy-le-Château (Berjolet, ferme de Cranne) et fournit des travailleurs.

Le Régiment est relevé le 1er Novembre 1917, pour aller non loin de là, à Nampcel (Oise), où il ne trouve guère pour s'abriter que des pans de murs ou d'anciennes « cagnas » allemandes.

Le 8 Novembre, commençait la période de Tranchées qui devait être la dernière pour le Régiment, mais aussi la plus longue et la plus dure. Les hommes furent relevés pour la plupart, mais certains Officiers restèrent en secteur pendant 32 jours, par un froid intense et dans un véritable cloaque, ayant à subir des bombardements et des coups de main continuels, et le masque à tout moment sur la figure.

Le secteur tenu fut le C.R. de Rosières, les réserves étant aux carrières de la ferme Aumont. Un petit poste avancé occupait la ferme Rosières, en vue de Fresnes, où était l'ennemi. Nos lignes passaient sur le « Plateau ». Dés le début, la garnison eut à souffrir de bombardements violents et d'émissions de gaz. Le 22 Novembre, au petit jour, un premier coup de main ennemi se déclenche, annoncé par un bombardement d'une intensité inouïe. Le coup de main échoue.

Le 3 Décembre, à 8 heures du soir, l'ennemi fait une seconde tentative, il essaie d'enlever la garnison de Rozières ; malgré le pilonnage de la ferme et de ses abords et malgré les pertes, les Allemands ne peuvent gagner la ligne et se retirent, laissant sur le terrain 14 morts.

Le 7 Décembre, un bombardement à gaz, systématique, fait de nombreux blessés qui doivent être évacués. Le 10 Décembre, enfin, le régiment est relevé. Ce fut son dernier jour de « Tranchées » proprement dites. Il les avait tenues, tant en Alsace que dans ces derniers secteurs, pendant un total de plus de 450 jours Par Clairvoix (sur l'Oise) et Mogneville, le Régiment se porte sur Mériel, où il se disloque le 14. L'État-major, le 1er et le 3ème Escadrons se rendirent à Saint-Germain-en-Laye ; le 2ème Escadron à Paris (quartier Dupleix) pour participer aux services d'ordre ; le 4ème à Saint-Léonard, à la disposition de l'École d'État-major de Senlis.

Le 31 Janvier 1918, le Régiment se rassemble autour de Gouvieux d'où il s'embarque le 24 Février à Senlis. Il débarque à La Guerche (Cher). L'État-major cantonne au Gravier, les Escadrons dans les environs.

Les 27 et 28 Mars, le Régiment s'embarquait à Fourchambault : il allait connaître une nouvelle forme de la guerre, intermédiaire entre la Guerre de Mouvement et celle de position. Après tant de kilomètres parcourus et de Tranchées tenues, le 15ème Dragons était prêt pour l'une et pour l'autre.



Les opérations de 1918 - Locre.



Après un long voyage par Nevers, Bourges, Saint-Pierre-Descorps, Le Mans, Alençon et Rouen, le Régiment, débarque le 29, au son du canon, à Bacouel (Sud-ouest d'Aamiens). Mais l'heure d'intervenir n'a pas encore sonné pour lui : il se porte à Sommereux (Oise) où il reste alerté jusqu'au 6 Avril, puis se dirige, à fins de rassemblement, vers la Seine-Inférieure. Il passe à Abancourt, Gaillefontaine, Menonval, Saint-Léger-aux-Bois.

Le 12 Avril brûlant les étapes (Buigny-1'abbé, Bucamps, Coulomby), le Régiment traverse Saint-Omer le 15 et fait halte au N. de Cassel, à Zermezeele (Nord).

La journée du 16 se passe la bride au bras. Vers le soir, commence un bombardement inouï, avant-coureur de l'attaque ennemie sur les Monts-de-Flandre. Le 17, à 17 heures 30, le Régiment passe la frontière de Belgique à l'Abeele et s'installe au bivouac au Nord-ouest de Reninghelst : il a l'ordre de seller le lendemain pour 4 heures.

Le 18 avril, à l'Ouest de Westroute (Westouter) le Bataillon à Pied, est constitué, le 2ème Corps de Cavalerie comprenant, outre la 3ème Division Cavalerie, la 2ème Division Cavalerie et la 6ème Division Cavalerie. L'effectif de la troupe est de 380 Sous-officiers, Brigadiers et Cavaliers.

Cependant que le détachement haut le pied va cantonner à Houtkerque, puis à Zeggers-Cappel, le Bataillon s'installe à Westoutre où il trouve, contre toute attente, un abondant ravitaillement, abandonné par les habitants. Le bombardement qui continue par alternatives, épargne à peu près le village, où les hommes creusent des Tranchées.

Le 22 Avril, dans l'après-midi, arrive l'ordre de relever au Mont-Rouge le Bataillon de la 6ème Brigades de Dragons. Après les reconnaissances préliminaires, le détachement s'ébranle vers 22 heures, en colonnes de Sections, et commence à gravir les pentes ; il arrive au faîte sous un vacarme d'Artillerie ennemie et dans la demi-lumière des incendies : Bailleul brûle comme une torche à l'horizon.

Le P. C. du Commandant est installé dans une ferme isolée sur le versant méridional (Point 493.539 du Plan Directeur) et les Compagnies relèvent leurs camarades de la 6ème Brigade de Dragons sur la ligne dite «anglaise », ossature d'une parallèle de résistance, ébauchée par nos Alliés et qui épouse sensiblement le « Chemin d'Ypres » avec un crochet défensif fermant la coulée de la Douve.

La Compagnie DUCASSE est à peine installée, qu'une Compagnie du 83ème Régiment d’Infanterie vient se superposer à elle : elle est alors renvoyée à Westoutre et la Compagnie De LEOBARDY reste seule en ligne avec le Commandant de Bataillon et la Demi-compagnie de Mitrailleuses, les hommes creusant dans le talus du chemin des trous individuels.

Les journées du 23 et du 24 se passent dans un calme relatif : le bombardement blesse toutefois quelques hommes; une bombe d'avion, qui tombe près du P. C. fait un mort et plusieurs blessés. Le 24, à la nuit, des ordres ayant été donnés pour l'organisation défensive du Mont Rouge et Vidaigne, tout le Bataillon est mis au travail ; mais le 25, à 1 heure du matin, l'avis arrive, donné par un prisonnier, que l'attaque est imminente. Les travaux sont aussitôt interrompus, les Compagnies sont renvoyées à leurs emplacements, et plusieurs Officiers partent pour reconnaître les avancées de la ligne de surveillance, que de petites garnisons doivent occuper avant le jour.

A 2 heures 20, le bombardement, prévu pour 4 heures seulement, se déclenche avec des obus de gros calibres et toxiques ; tout le secteur est battu avec une violence uniforme. Les pertes sont aussitôt très fortes ; les Officiers partis en reconnaissance sont coupés de leur troupe; un certain flottement se produit.

Deux Sections prennent leurs emplacements de combat à quelques mètres en arrière du « Chemin d'Ypres », se protégeant de leur mieux contre le tir des avions ennemis qui les survolent à faible hauteur. Tout le jour, elles resteront déployées à angle droit, occupant alternativement suivant la direction de l'attaque, le front du chemin au Sud-ouest de Locre, ou le front face au Sud, gardant le débouché de la Douve, ce dernier front prolongé sur la droite par les autres Sections de la Compagnie.

Cependant la compagnie DUCASSE reçoit l'ordre de se porter vers le ravin qui, à l'Ouest du Kemmel, remonte vers Brulooz. Elle doit essayer d'y arrêter l'infiltration ennemie. L'avant-garde prend le contact à 1.500 m. Sud-est de Locre, et la Compagnie tente de s'établir sur la crête Ouest du ravin ; mais, aussitôt débordée par la gauche, elle se replie vers le cimetière et l'hospice de Locre. Un nouveau débordement, cette fois vers la droite, sur le Lokerhof, amène le Commandant DUCASSE à s'établir sur la route Locre-Dranoutre, en liaison à droite avec une Compagnie du 413ème.

A 15 heures, l'avance ennemie semble contenue et la Compagnie, dépassée par l'Infanterie, se trouve en deuxième ligne. Elle a déjà subi à ce moment d'assez fortes pertes.

L'opération retardée par des difficultés de concentration est commencée le 26 Avril à 1 heure du matin; elle se heurte à des forces telles que le Commandant ne peut qu'organiser une ligne de résistance ainsi tenue : une Compagnie du 413ème de Locre à l'hospice, la Compagnie GIMON sur le front de l'hospice, deux Compagnies du 414ème, de l'hospice à la route Locre- Dranoutre.

Au petit jour, une Patrouille de la Compagnie GIMON fait un prisonnier, qui annonce que l'ennemi se dispose à attaquer. Vers 7 heures en effet, commence un bombardement, qui dure trois heures et tel que la Compagnie de gauche, du 414ème, doit être reportée un peu en arrière. L'attaque se déclenche très violente ; sous la pression ennemie, la Compagnie du 413ème est amenée à se replier. Une poche se creuse devant l'hospice qui est perdu.

L'ordre de contre-attaquer est donné. La Compagnie décimée. Les survivants, menacés à nouveau d'encerclement, se retirent en combattant, ne perdant que quelques prisonniers, tous blessés graves, et se reforment en arrière, aux lisières de Locre, pour rétablir la liaison avec les éléments refoulés du 413ème et du 414ème.

Ils rencontrent alors la Compagnie De LEOBARDY déployée dans le chemin creux, à 400 mètres Nord de l'église. Cette Compagnie avait reçu l'ordre, à 2 heures du matin, d'assurer avec les divers éléments des cavaliers pied à terre, la garde des abords de Locre, entre Locre et Brulooz, en liaison avec la 28ème Division d’Infanterie Elle avait donc quitté ses emplacements de la veille, d'ailleurs bouleversés en y laissant hélas plusieurs tués.

Le Commandant La SALLE, après reconnaissance du village de Locre, à moitié détruit, avait décidé de porter cette compagnie, avec une Compagnie du 20ème et la Section de Mitrailleuses dans ce chemin creux qui offrait un abri relatif et une ligne de résistance assez sérieuse. C'est là que la Compagnie GIMON rejoignit le Bataillon où elle fut mise en réserve.

Cette journée du 26 fut particulièrement angoissante et meurtrière pour la garnison du chemin creux.

L'arrivée des Bataillons à pied des 4ème et 12ème Dragons, puis des 17ème et 18ème Chasseurs, permit la relève du Bataillon La SALLE qui avait l'ordre de se rassembler dans la nuit, au Coucou, ce qui ne se fit pas sans de nouvelles pertes.






Pierre LEROUSSEAU est tué le 26 avril 1918 devant Locre (Belgique)

Il est cité à l'ordre du régiment le 24 mai 1918. Cavalier d'une grande bravoure, a trouvé une mort glorieuse au cours d'une contre-attaque le 26 avril 1918. Il est décoré de la Médaille Militaire à titre posthume.